Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Dons

Faites un don par carte bancaire avec notre partenaire HelloAsso, clic sur le lien ci-parès :

Dons

SERIC 2024

Clic sur le lien ci-après :

SERIC 2024

La personnalité hors norme de l'émir Abdelkader continue à éclairer le monde. Il a fait l'histoire avec hauteur de vue et humanisme, il a exercé ses responsabilités avec un sens de l'éthique inégalé. Lors de la moubayaa serment il a proclamé :
« je ne veux pour moi aucun des prestiges auxquels vous pensez ».

 

L'émir Abdelkader el-Djazairi el-Hassani appartient au patrimoine éternel de l'Algérie et de l'humanité. Iest plus que légitime de rappeler l'œuvre monumentale de celui qui le premier semé les graines libératrices. Il est un modèle sur tous les plans. L'émir a traduit dans la vie l'idéal que les prophètes et les sages visaient : l'homme accompli, total, au service du bien commun.

Il a dominé le XIXe siècle de sa stature multidimensionnelle. En ces temps de désordres l'humanité a besoin de ses enseignements. Le meilleur homme, disait-il, est celui qui est le plus utile à sa patrie et à l'humanité. Il est le fruit de la culture de son pays l'Algérie, carrefour des civilisations, jonché d'épreuves.

 

Le monde peut trouver dans la figure hors du commun de l'émir une méthode pour relever les défis de notre temps. Incomparable humaniste, tout à la fois, Maitre spirituel, chef de la résistance, fondateur de l'État algérien moderne, il a mené tous les combats essentiels et assumé le destin avec génie et noblesse.

 

Le savant vertueux et maitre spirituel

 

Le monde entier reconnaît ses hautes vertus et son génie, y compris ses adversaires et ennemis. En tant que précurseur du droit humanitaire et du dialogue des civilisations. Stratège et  éveilleur des consciences, il a fait connaître au monde le vrai visage de l'islam et celui de l'humanité civilisé. Les faits historiques et les multiples documents sur son œuvre et sa vie en témoignent. En premier lieu à partir de ses propres écrits et ceux des témoins.  Il a écrit son autobiographie Tuhfat Ezzair

 

Il publia Dhikra el Akel wa Tenbih el ghafel», Rappel au raisonnable et avis au distrait, écrit durant sa détention où il débat sur des questions essentielles.  Dans « Le livre des haltes », El Mawâqif , il traite de l'éducation de l'âme, de ses réalisations spirituelles, sa propre expérience soufie, en prolongement de l'œuvre d'auteurs comme Ibn Arabi et Abu Hamed Al Ghazali.  Il était un humaniste arif : « Voilà, écrit-il, des inspirations spirituelles, survenant par pur don, et des secrets cachés, dépassant la limite des intellects humains et des connaissances indirectes, au-delà de toutes les catégories et de savoir livresque. »

 

Penseur pluridisciplinaire, homme de confluencesfidèle à ses racines et ouvert sur le monde, il a eu des échanges de lettres avec des centaines de personnalités et courants de pensée à travers le monde. Il ne négligeait aucun aspect de l'existence. Il visait l'excellence, l'ihsan, réalisant les perfections spirituelles sur les traces du Prophète. Pour renouer avec l'horizon civilisationnel, c'est l'émir qui a initié l'idée de Renaissance, la Nahdha.

 

Il est le modèle de la plénitude et du juste milieu. Il était pétri de la culture de la dignité, attaché à ce qui permet l'élévation humaine.  Sans cesse, il se rattache au Prophète, à et aux hautes valeurs communes de toutes les civilisations. Son humanisme spirituel se voulait universel, celui de la convergencesans nier les divergences. Il affirmait « Si les musulmans et les chrétiens m'écoutaient je ferai d'eux des frères ». Il aimait répéter le verset coranique qui préconise le respect de la pluralité pour le vivre ensemble

وَلَوْ شَاءَ ٱللَّهُ لَجَعَلَكُمْ أُمَّةًۭ وَٰحِدَةًۭ وَلَـٰكِن لِّيَبْلُوَكُمْ فِى مَآ ءَاتَىٰكُمۡۖ Le vivre ensemble un don et une épreuve. Pour cela, il enseignait que l'interconnaissance taaruf est la condition de la coexistence taayuche

 

Le résistant et fondateur de l'état moderne

 

À vingt-trois ans, le 27 Novembre 1832, il est propulsé sur le devant de la scène mondiale, investi en qualité d'Émir, pour mener la résistance nationale. Un destin qu'il a assumé, tout en reconnaissant : « Je n'étais pas né pour faire la guerre. Et pourtant, j'ai porté les armes toute ma vie !» Il refusa le titre de « Roi », ou de « Sultan », préférant celui d'Émir, afin de marquer qu'il n'avait pas d'ambition personnelle. 

 

Pour l'Émir, la résistance, n'a de validité qu'en cas de légitime défense, avec des conditions strictes, derniers recours pour rétablir la paix au nom de la souveraineté nationale et un état de droit. Son génie consistait à s'appuyer sur trois facteurs : l'adhésion des masses, l'exemplarité du chef et des élites et la mobilité des moyens.

Il ne s'agissait pas seulement de se battre, mais en même temps de bâtir un État, de rénover la société sur la base de principes civilisationnels. Sa politique humaniste et sa culture de la paix, s'expriment dès 1837 par un texte sur la détention des prisonniers. Il rédigea en 1843 un décret sur les méthodes de l'art de la guerre au sens humanitaire. Le Comité International de la Croix Rouge reconnait son œuvre.

 

   Alors que l'armée coloniale viola tous les principes éthiques et les traités. L'émir répondait : « ...je n'ai jamais trahi la parole donnée » Son sens de la guerre juste et son humanisme s'expriment en 1837 par un texte sur le droit des prisonniers.
Puis en 1843 par un décret sur l'art de la guerre : « 
Tout individu qu'il soit malade, blessé ou prisonnier ou incapable de se défendre doit être traité avec humanité et sans la moindre discrimination. ». 
Il n'a pas confondu, entre l
a soldatesque coloniale et la religion chrétienne.

Le combat était inégal entre un chevalier intrépide, fort de sa cause juste et de la fidélité de ses soldats, face à la plus puissante armée du XIXe siècle.  Les forces occupantes s'engagent dans une politique de colonisation généralisée. En 1843 elles s'emparent, en l'absence de l'Émir, de la Smala, capitale mobile, reflet du génie du chef de la résistance, et détruit sa bibliothèque, plus de cinq mille livres. Aux crimes de guerre s'ajoute un génocide culturel. L'Émir sonne l'alerte.
Dans une de ses lettres, il écrit : « J'ai combattu pour ma religion et mon pays. J'ai rempli mon devoir...Lorsque Dieu m'enjoignit de me lever, je me suis levé. J'ai fait parler la poudre jusqu'à l'extrême limite de mes possibilités. »  

Le 21 décembre 1847, l'Émir réunit son conseil de guerre pour la dernière fois : « Nous avons combattu quinze années, pour sauver notre peuple de la domination que puis-je faire encore alors que la cause est pour le moment perdue. ... » 

  

Il a offert à son peuple et au monde entier un modèle d'héroïsme et d'humanisme qui marque la culture de la dignité pour toujours. En visionnaire il savait qu'un jour l'Algérie retrouvera sa souveraineté. Il ne peut y avoir de paix sans justice. 

 

Il avait confiance aux futures générations de son pays. Ne voulant pas abandonner son peuple, il l'exprimera : « je ne pouvais me résoudre à descendre de mon cheval et dire un éternel adieu à ma patrie. J'avais juré de défendre mon pays et ma religion jusqu'à ce qu'aucune force humaine n'y puisse plus suffire » il précise : « je n'ignorais pas quelle serait l'issue plus ou moins tardive de la lutte... la conscience apaisée, je sais que le temps à l'échelle de l'histoire d'un peuple ne peut être que celui du rétablissement de la justice » Confiant : « Jamais ce peuple ne se soumettra. Cette terre n'acceptera pas le joug de l'étranger ». Il écrit « tu as atteint ton but, Abdelkader, sois tranquille, ta nation revivra et le rameau de la guerre libératrice ressuscitera ».

 ​​​​​​​

Dialogue des civilisations et mondialisation

 

Une nouvelle étape de sa vie s'enclenche. Il sera un artisan du dialogue des civilisation et de la fraternité, pour mettre fin à la loi de la jungle. Il est le premier qui perçoit la venue de la mondialisation avec ses opportunités et ses risques.  Après la lutte armée, le temps du combat intérieur et civilisationnel advint.  L'Émir, fidèle à ses principes, avec l'art diplomatique qui était le sien, déclina toutes les propositions.  Toutes les tentatives de récupération de sa notoriété échouèrent.

 Damas en 1860, lors d'émeutes dans le cadre d'un conflit interconfessionnel, l'Émir au prix de sa vie et de ses compagnons, a sauvé quinze mille chrétiens de la mort. Le monde entier lui rendit hommage. Il reçut des distinctions. Il était attaché à ce qui pouvait concilier l'Orient et l'Occident.  Il échappe à toute catégorisation ou tentative d'instrumentalisation.

L'Émir explicite sa vision : « Le bien que nous avons fait aux chrétiens n'est autre que l'application de la Loi de l'Islâm et le respect des droits humains. » En même temps, il savait que le Coran et la pensée universelle recommandent la vigilance, afin de ne pas être otage de l'autre.  Dialoguer, mettre l'accent sur l'amitié et le rapprochement, ce n'est pas la compromission et la dilution, mais la recherche du compromis raisonnable pour le bien commun. L'Émir rappelle qu'il faut s'assurer que la question d'un ordre mondial et des droits humains ne soit pas imposée à partir des postulats d'une seule culture, mais à partir de toutes les cultures en présence. Son combat pour le vivre ensemble juste est d'actualité.

Le peuple Algérien et les forces vives à travers le monde reconnaissent en l'Émir leur modèle universel, parce qu'il a été à la fois : le chef héroïque de la résistance anticoloniale, le fondateur de l'État moderne algérienle précurseur du droit humanitaire moderne et un savant humaniste spirituel. 

 

Être digne de l'héritage de l'Émir, c'est œuvrer à l'État national stratège, à la légitimité populaire, à l'éducation éthique, au lien entre unité et diversité et authenticité et progrès, afin de bâtir le vivre ensemble mondial.   Sans nul doute son souffle habite les pensées de tous les justes   

 

 *Mustapha Cherif est philosophe professeur des Universités, lauréat du prix Unesco du dialogue des cultures, membre du Conseil Consultatif de l'ONU sur l'Alliance des civilisations ; auteur d'une vingtaine d'ouvrages, dont « L'émir Abdelkader apôtre
de la fraternité »
, éditions Casbah Alger et Odile Jacob, Paris.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article